Le SLUC annonce la couleur
Même s'il convient de relativiser l'ampleur du score, les Nancéiens ont affiché leurs forces et leurs ambitions en Allemagne. Vivement la suite...
BAMBERG. (De notre envoyé spécial). Scène étonnante et inhabituelle, mardi soir, à la fin du match, dans la grande Jako Arena de Bamberg. Debout au milieu du terrain, le coach Dirk Bauermann demande le micro au speaker et s'adresse au public : « Je tiens à excuser l'équipe pour sa piètre prestation. Je vous promets que cela n'arrivera plus ». Le SLUC serait donc passé par Bamberg au bon moment ? En tout cas, il y a fait de drôles de dégâts. Et on doute que les chaleureux supporters allemands aient reconnu leur équipe, celle qui était parvenue à équilibrer les comptes la saison dernière dans le prestigieux top 16 de l'Euroligue (3 victoires - 3 défaites).
Gagner de 34 points à l'extérieur en coupe d'Europe, cela n'arrive pas tous les jours. Le SLUC n'avait d'ailleurs jamais été à pareille fête (voir par ailleurs). Et on imagine la tête des entraîneurs de Gran Canaria, d'Hemofarm, Vilnius et Athènes lorsqu'ils ont pris connaissance du score... De là à ce qu'ils profitent de l'occasion pour refiler gentiment l'étiquette de favori du groupe au double finaliste du championnat de France, il n'y a pas des kilomètres. « L'ampleur du score est un épiphénomène », estime Jean-Luc Monschau, « Ces clubs-là n'ont pas besoin de nous désigner favoris. Ils assument leur statut et ils vont surtout se dire que Bamberg a eu un accident ».
Meilleure défense de Pro A
Après tout, la thèse de l'accident conviendrait parfaitement aux Nancéiens. Elle laisserait supposer que d'autres iront se prendre les pieds dans le tapis en Bavière. La suite nous le dira... Mais quel que soit le véritable niveau de cette équipe de Bamberg, le SLUC, lui, a réussi un joli coup pour sa première sortie sur la scène européenne. Dans la perspective d'une qualification pour les huitièmes de finale, il s'est offert un joker qui peut s'avérer précieux. « Nous n'avons pas la prétention d'annoncer que nous allons faire des coups à l'extérieur », affirmait Jean-Luc Monschau la veille du match, « Ce sont les circonstances du match qui décident ». Il ne pensait sans doute pas que l'occasion se présenterait aussi rapidement.
D'autant que la victoire laborieuse, quatre jours plus tôt face à Reims, n'incitait pas à un optimisme béat. Entre-temps, le SLUC s'est reconcentré sur le sujet. Celui d'une coupe ULEB qu'il a manifestement l'intention de prendre très au sérieux. Entre-temps, il a aussi récupéré son tandem Julian - Zianveni. Laissés sur le banc en début de match, mais rapidement appelés en renfort, les deux gaillards ont dominé les intérieurs adverses. L'un comme l'autre semblent prêts à aller défier l'ASVEL, dimanche. Et puis le SLUC a retrouvé en Allemagne ce qui tend à devenir la clé de voûte de son jeu : sa défense, agressive, solide, faite d'intensité.
Même si Bamberg n'était pas dans un grand soir, on ne maintient pas un adversaire à 49 points dans sa salle par hasard. Coïncidence : pendant que le SLUC mettait la tête de Bamberg sous l'eau, il devenait également la meilleure défense de Pro A (l'ASVEL ayant encaissé 78 points à Paris). Quelle belle soirée...
Thomas SIMON
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Un succès record
NANCY. - En s'imposant très largement à Bamberg (83-49, +34), le SLUC a frappé un grand coup et mis à mal plusieurs de ses records statistiques sur la scène européenne. Si le SLUC n'a pas signé sa plus large victoire continentale, il a en revanche égalé sa meilleure performance réalisée à l'extérieur, mais aussi établi un nouveau record en ce qui concerne le nombre de points concédés sur un match. Oui, vraiment très fructueux, ce 71e match européen disputé mardi par le SLUC...
LES PLUS LARGES VICTOIRES DU SLUC
+47
SLUC - Sparta Prague (103-56, 1997)
+41
SLUC - Talinn (95-54, 2004)
+37
SLUC - Bree (101-64, 2002)
+36
SLUC - Siauliai (104-68, 2005)
+34
IRB Reykjavik - SLUC (67-101, 1999)
+34
Bamberg - SLUC (49-83, 2006)
LES MATCHES LES PLUS HERMÉTIQUES DU SLUC
49
Bamberg - SLUC (49-83, 2006)
50
SLUC - Meysu Spor (72-50, 1996)
54
Talinn - SLUC (54-87, 2003)
54
SLUC - Talinn (95-54, 2004)
56
SLUC - Sparta Prague (103-56, 1997)
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Républicain lorrain
Nancy marque son territoire
En étrillant Bamberg chez lui, le Sluc a donné un signal fort à tous ses rivaux. Et si Nancy ne se contentait pas d'être un leader du championnat de France? L'appétit vient en gagnant...
Bamberg tout entier se souviendra, longtemps, du passage dévastateur de ces Lorrains sans pitié. On avait même mal pour ces Allemands, amoureux transis du basket, qui s'imaginaient le meilleur des mondes lors de ce tour d'horizon européen. Les premières notes de l'international, dans cette nouvelle Jako Arena en tenue de soirée, ont débouché sur une musique n'adoucissant pas les moeurs. Quand on s'appelle Dirk Bauermann, que l'on dirige aussi l'ensemble allemand et sa star Nowitzki depuis pas mal de saisons, on prépare autre chose qu'un concert de louanges à ses artistes maudits: "Je vais les remettre sur le droit chemin ces jours-ci!> Les consolations de son homologue Jean-Luc Monschau n'ont pas apporté le bémol souhaité: "La différence entre nos équipes n'est pas aussi criarde que le score."
Une gentillesse d'usage de la part du patron nancéien toujours aussi professionnel. Lorsqu'il tourna les talons sur ce score de rêve, il lança: "Le match le plus important est celui de dimanche." Ça calme les ego qui auraient cette outrecuidance de se taper sur le ventre gonflé de trop de gloriole, souvent compagne éphémère. Place à Villeurbanne mais sûr que le coach du Sluc était cependant animé d'un violent feu intérieur. Laisser ainsi sur le bas côté de la route le champion d'Allemagne 2005, laisse augurer d'une campagne prolifique en ULEB Cup. Il suffirait de cogner le N°1 lituanien (favori du groupe A) mardi prochain pour déjà évoquer une qualification en 8es de finale. Le passé montre que cinq succès en dix journées suffisent... "Cette victoire peut nous donner des idées>, confirmait le royal Tariq Kirksay. "A condition de rééditer ce genre de rencontre!"
Linehan au top
L'équipe de Gentilly en a évidemment les forces. Au complet, n'est-il pas normal, finalement, que le premier de France ne donne la leçon à un dauphin de Bavière? Jean-Luc Monschau repart de Bamberg, la romantique meurtrie, avec des certitudes ciselées: les fautes personnelles envoyant les hommes en forme (Linehan, 3 dès la 14e minute, et Samnick, éliminé) sur le banc, n'empêchent pas le Sluc de vaincre; Julian et Zianveni sur pied, Nancy possède vraiment le plus bel intérieur de France; il peut compter sur les anciens (DeRon Hayes) comme sur les jeunes (Salmon); l'artilleur Banks confirme; le collectif est devenu une culture club. La défense aussi... "Nous avons su rester constamment organisés dans ce secteur", confiait Max Zianveni, dunker assagi veillant au grain sous son panneau.
Avec John Linehan, le Sluc a décidément pris une autre dimension. "Nous avons très bien préparé ce match et on savait qu'il y avait quelque chose à faire!" Petits cachottiers sur leurs intentions internationales jusqu'alors, les Lorrains ont vu l'escapade germanique étaler au grand jour leurs ambitions dans cette compétition dont les spécialistes vantent la qualité. Quelques duels supplémentaires seront les bienvenus pour étalonner cette entrée en fanfare: Bamberg est-il une grosse caisse sans résonance ou le Sluc a-t-il l'envergure nécessaire pour faire la circulation au carrefour de l'Europe?
Alain THIÉBAUT.
Paru le : 02-11-2006