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Basket-ball / La demi-finale des play-offs, vue de Nancy
L'esprit d'EisenbachLe 15 mars 2006, tout le SLUC a pleuré. Jean-Jacques Eisenbach, président pendant trente ans, est décédé des suites d'un cancer. Depuis, les Cougars jouent aussi pour lui.
C'était au lendemain du décès de Jean-Jacques Eisenbach. Christian Fra, successeur de « JJE » à la présidence du club au début de la saison dernière, confiait, dans les colonnes de l'Est Républicain :« J'ai perdu mon guide. Jean-Jacques sera regretté à Nancy mais aussi dans tout le basket français. » Cyril Julian parlait lui d'un « père spirituel » qui s'était en allé. « Quand j'avais besoin d'un conseil, je n'hésitais pas », glissait le pivot de l'équipe de France, formé au SLUC.
Le match suivant, l'équipe lorraine avait joué pour son président défunt. Nancy avait battu Cholet « pour lui ». Avant d'enchaîner les victoires pour signer la meilleure saison de son histoire, avec une deuxième place finale à égalité avec le leader, Pau-Orthez. Et un dernier hommage, au soir du dernier succès en saison régulière (102-65 contre Rouen) : le portrait du président, vers lequel tous les joueurs se sont tournés.
Il assiste aux matches des
minimes ou des cadets avec
le même enthousiasme Jean-Jacques Eisenbach était arrivé au SLUC presque par hasard, au lendemain de la relégation du club en Nationale 2 - l'actuelle Pro B -, en 1974. Un président démissionnaire, personne pour prendre le relais. Le directeur des sports de la ville contacte un ami à lui, ex-pilote automobile et basketteur du dimanche matin.
Le SLUC, malgré trois saisons au plus haut niveau est alors encore un club très amateur. Le club joue dans une salle de lycée qui contient 800 places, attire les mêmes habitués de semaine en semaine.
Le nouveau président mettra 20 ans à structurer et faire progresser le club. Il déménage à Gentilly première version, qui contient 2 500 à 3 000 places. Le club s'étoffe, noue un partenariat avec l'Est Républicain. L'élément décisif, fondateur presque. Le club commence à grandir, la salle se remplit, des partenariats se nouent. Sans jamais dépenser un centime qu'il n'a pas, le SLUC va progressivement jouer les premiers rôles de la Pro B d'alors, pour finalement retrouver le plus haut niveau en 1994.
En coulisse, son président continue d'oeuvrer, dans l'ombre, consacrant la moitié de ses journées, une bonne partie de ses nuits, au club. Le dimanche, il assiste aux matches des minimes des cadets, avec le même enthousiasme, les mêmes encouragements, les mêmes colères.
Chez les « grands », le SLUC devient un club de plus en plus respecté en France, investit le nouveau Gentilly - l'actuel Palais des sports Jean-Weille - et ses 6 000 places, son espace VIP devenu indispensable dans le sport de haut niveau.
« Les joueurs y pensent,
c'est dans un coin
de leur tête » Rattrapé par la maladie, « JJE » laisse la présidence à Christian Fra, au début de la saison 2004/2005. Mais il continue d'arpenter les couloirs de Gentilly, d'être le premier installé derrière son bureau. Le SLUC dispute la finale du championnat après avoir accroché la coupe Korac à son palmarès.
En février 2006, Nancy dispute la Semaine des As. Très affaibli, Jean-Jacques Eisenbach fait tout de même le déplacement. Sa dernière aventure, à l'âge de 66 ans. Son décès fait l'effet d'un coup de tonnerre. « Des dirigeants comme lui, il n'y en a pas », tranche Mario Santini, ancien joueur emblématique du club de 1973 à 1981.
Revenu dans l'encadrement du club en 1990, il oeuvre aujourd'hui, aux côtés de Jean-Luc Monschau, dans la cellule « recrutement » du club et a bien connu Jean-Jacques Eisenbach. « Il aurait pu valoriser son travail de président, devenir salarié ou entrer en politique, il ne l'a jamais fait », poursuit Mario Santini. « C'était un passionné ».
A la veille de la série la plus importante de son histoire - un succès sur la SIG conjugué à une qualification de Pau pour la finale assurerait au SLUC une première participation en Euroligue - le SLUC aura forcément une pensée pour Jean-Jacques Eisenbach.
« Les joueurs y pensent, c'est dans un coin de leur tête, raconte Santini. Après le succès sur Chalon (victoire 79-78 après un retour exceptionnel du SLUC en fin de match), Cyril Julian a eu cette réflexion : "il ne peut rien nous arriver, il nous protège de là-haut" ».
Cyril Tromson